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Delhaize : une nouvelle rencontre pour rien… Vraiment ?

Catégorie

Actualité

Publication

04/05/2023

Delhaize : une nouvelle rencontre pour rien… Vraiment ?

Un échec, la réunion d'hier avortée, entre Delhaize et les syndicats ? C'était couru d'avance : rien ne pouvait quoi qu'il arrive progresser avant la manifestation – et la réunion – du 22 mai. Mais en revanche, derrière l'éternel refrain du "blocage" repris dans la presse, la pression monte sur toutes les parties. Peut-être finira-t-on bien par parler concrètement, après le 22 mai. Ce qui rejoindrait notre pronostic initial, formulé dès le début du conflit : celui d'un long scénario prolongé jusqu'à l'été…

Une fois de plus, la rencontre tenue hier après-midi entre Delhaize et les partenaires sociaux n'a pas abouti, les syndicats la quittant prématurément en constatant que l'entreprise ne renonce pas à son plan de franchisation. A la huitième semaine de conflit, on pourrait donc toujours parler de blocage et d'impasse. Mais à vrai dire, ce résultat était parfaitement prévisible. "Nous refusons de parler de plan d'avenir lors d'un conseil d'entreprise ordinaire,"ont fait savoir les syndicats quand la Direction a tenu à évoquer son plan d'avenir. Dès le moment où un mot d'ordre de manifestation nationale a été lancé en front commun syndical pour le 22 mai, date à laquelle doit aussi se tenir la prochaine réunion de concertation, il semblait totalement illusoire d'attendre une quelconque avancée de celle-ci. Et ce d'autant plus que les syndicats étaient passablement énervés par la prolongation par la justice de l'interdiction des piquets de grève devant les magasins, non plus seulement à Bruxelles et dans le Brabant flamand, maissur tout le territoire belge.

Certes, l'ambiance est donc plus que froide entre les parties. La méfiance règne, et jusqu'au-delà de la réunion elle-même. Delhaize avait ultérieurement transmis aux syndicats le document de présentation servant de support à la réunion. Les syndicats s'émurent d'y trouver un 'slide' détaillant des étapes futures du processus établissant que l'entreprise souhaiterait passer en force, sans concertation. "Pas du tout," corrige-t-on chez Delhaize. "Il ne s'agit que d'hypothèses que nous souhaitions discuter au cours de la réunion. Celle-ci ayant tourné court avec le départ prématuré des syndicats, nous n'avons même pas eu l'occasion de parcourir cette page, qui ne reprend que des hypothèses sur lesquelles nous souhaitions précisément échanger." Et pour prouver sa bonne foi, Delhaize a dressé l'inventaire des garanties que l'entreprise offre au personnel des magasins concernés, et que le départ des syndicats ne lui a pas permis d'aborder en réunion.

Le blocage peut-il indéfiniment se poursuivre ? Cela semble difficile, quand bien même les syndicats se disent toujours aussi résolus. Les grèves, qui ne sont pas coûteuses que pour l'entreprise, se sont taries. Quant à l'impact de ce conflit dans l'opinion, c'est aujourd'hui une constante pour tout sujet d'actualité : il vient un moment où le public s'en lasse.

Ces garanties sont multiples : le personnel conserverait son salaire et ses conditions de travail actuels. Les heures supplémentaires restantes pourront être payées au moment de la transition à la demande du collaborateur qui les a prestées. Les malades de longue durée seront également transférés. Enfin, et c'est clairement une proposition forte, puisqu'elle écarte un danger de possibles fermetures à court terme, Delhaize s'engage à conserver en gestion propre tous les magasins aussi longtemps qu'ils ne trouvent pas de candidat repreneur indépendant, et à maintenir les 128 magasins ouverts jusqu'à fin 2028, quand bien même ils n'auraient pas trouvé de repreneur.

Le blocage peut-il indéfiniment se poursuivre ? Cela nous semble difficile, quand bien même les syndicats se disent toujours aussi mobilisés et résolus. Les grèves, qui ne sont pas coûteuses que pour l'entreprise, se sont taries. Quant à l'impact de ce conflit dans l'opinion et sur la clientèle, c'est aujourd'hui une constante pour tout sujet d'actualité, que ça plaise ou non : il vient un moment où le public s'en lasse et s'en désintéresse. Le paquet de garanties promis par Delhaize, et désormais connu, maintient finalement à la fois l'intégralité des emplois actuels (à l'exception de la centrale) et des conditions qui les régissent. Et ceci déforce le discours syndical reprochant à l'entreprise de refuser toute concertation. Ce qui n'est pas négociable, c'est le principe d'une franchisation, qui déplait logiquement aux syndicats en les privant de représentation dans les 128 futures PME à apparaître. Mais le sort des travailleurs n'est pas menacé, et faute de discussion, Delhaize pourrait alors en attribuer le reproche à l'opposition doctrinaire des syndicats. Comme on l'a dit plus haut, le temps ne joue pas en leur faveur.

La confiance à gagner, la confiance à maintenir...

Mais Delhaize souhaite clairement lui aussi avancer dans ce dossier. Gagner la confiance des salariés est une chose, maintenir celle des candidats repreneurs en est une autre. En soi, les entrepreneurs, pour la plupart déjà dans le sérail Delhaize, maintiennent leur intérêt. Mais plus il apparaît que Delhaize multiplie les promesses sociales au personnel concerné, plus ils sont désireux de vérifier que ceci est compatible avec la rentabilité future du magasin qu'ils convoitent. Parmi les magasins exploités par des indépendants, AD Delhaize bénéficie de la rentabilité la plus favorable du marché, avec un EBITDA moyen se situant autour de 4,5%. Mais la crise énergétique pèse sur les frais, l'indexation des salaires aussi, et la concurrence comme l'impact de l'inflation sur le comportement des consommateurs n'aident pas à maintenir les marges.  Si la masse salariale des magasins intégrés Delhaize à reprendre pèse proportionnellement bien plus lourd (on parle de 17%) que celle qu'ils exploitent aujourd'hui, l'opération pourrait s'avérer très risquée. En d'autres termes : Delhaize ne formule-t-il pas des promesses généreuses dont il se défaussera sur les affiliés ? Là aussi, Delhaize nous répond en se montrant rassurant : "Nous avons toujours dit que nous souhaitions transférer ces magasins dans de bonnes conditions pour le personnel comme pour nos partenaires affiliés. Il est évident que tous les engagements pris à l'égard des premiers seront pris en compte dans le business plan spécifiquement construit pour faire de chaque point de vente un succès, et en toute transparence avec les entrepreneurs."

Source : Gondola