Depuis 2021, Micheline Claude en tandem avec sa fille, gère le magasin SPAR de Nassogne. Une aventure familiale palpitante et passionnante, mais aussi fatigante et exigeante. Retour sur le parcours atypique de cette gérante pleine d’énergie.
Jeudi 7 novembre. Il est 14h. Nous attendons depuis quelques minutes en déambulant dans les allées du SPAR de Nassogne lorsque Micheline fait son apparition. Au pas de course, elle nous demande de la suivre dans le réfectoire du magasin. Micheline, ce sont des yeux pétillants et un sourire sincère. C’est aussi personnalité énergique, totalement à l’aise dans un milieu qu’elle connait par cœur. « J’ai commencé dans le commerce en 1984, à une époque où mes enfants avaient 5 et 6 ans. Avant cela, je faisais des ménages. Et puis j’ai eu l’occasion de travailler au Delhaize de On (ndlr : entre Marche et Rochefort). J’y suis restée pendant 13 ans. Ce n’était pas facile, mais ce milieu m’a toujours plu. »
Au début des années 2000, Stéphanie, la fille de Micheline, termine ses études de comptabilité. Elle pousse sa maman à envisager de reprendre un magasin d’alimentation avec elle : « Ma fille Stéphanie voulait qu’on se lance ensemble. Elle était jeune, dynamique, et elle m’a convaincue. Nous avons d’abord cherché à reprendre une librairie, mais les avis des comptables sur la rentabilité nous ont fait changer de voie. Finalement, nous avons repris un petit magasin d’alimentation dans le centre de Nassogne en 2003 »
L’idée de Stéphanie est bonne et le commerce a du succès : « Le magasin avait déjà sa clientèle. Nous avons continué à le faire tourner avec notre énergie et notre passion. Avec Stéphanie, nous avions cette fibre commerçante. Nous avons su attirer encore plus de clients, en gardant une relation proche et humaine. »
Pour Micheline, travailler avec sa fille a toujours été une richesse inestimable. « Avec Stéphanie, tout se passe bien. On s’entend super bien. Oui, parfois on s’accroche un peu, mais c’est rare, et ça passe vite. »
En 2021, alors qu’elles sont dans leur zone de confort avec leur magasin, mère et fille prennent pourtant une décision cruciale : déménager dans un nouveau magasin plus grand et moderne. « L’ancien magasin devenait insalubre. On ne pouvait plus rester. »
Le changement, bien que nécessaire, n’est pas facile. « On a dû fortement changer nos habitudes. Heureusement, on a été très bien épaulées par l’équipe de SPAR, qui nous a aidées avant, pendant et après le déménagement. C’était un défi, mais ça en valait la peine. »
Elle se rappelle : « Dans l’ancien magasin, les clients venaient souvent pour acheter quelques articles. Maintenant, ils font leurs courses complètes chez nous. Cela montre qu’on a réussi à faire évoluer notre commerce dans le bon sens. »
« Ce que j’aime dans ce métier, c’est le contact humain. Nous avons une clientèle très correcte, des gens avec qui on peut discuter. Ils apprécient qu’on soit présentes. C’est cela qui fait la différence et c’est ce que j’adore dans mon activité. Mais il ne faut pas se voiler la face : c’est un métier exigeant. » Micheline souligne d’ailleurs les longues heures de travail auxquelles elle a dû faire face au début de la reprise du magasin : « Lorsqu’on a commencé ici, on a dû travailler comme jamais auparavant. On était présentes nuit et jour, la semaine comme le week-end. C’était vraiment très énergivore et fatiguant ».
A présent, les choses vont mieux, mais la charge de travail reste importante : « Depuis trois ans, nous n’avons pas pris de vraies vacances. Un week-end de temps en temps, c’est possible, mais une semaine entière, c’est hors de question. Le travail s’accumule très vite. »
Les crises récentes ont également mis leur résilience à l’épreuve. « Pendant un mois, notre facture d’électricité a grimpé jusqu’à 12 000 euros. Je craignais d’ouvrir mon ordinateur pour regarder les chiffres. Heureusement, on a installé des panneaux solaires. Maintenant, on tourne autour de 3 000 euros, ce qui est beaucoup plus gérable. Mais cette période a été très stressante. »
Travailler en famille est une aventure, avec ses hauts et ses bas. Mais quoiqu’il en soit, Micheline insiste sur le soutien de son entourage : « Mon mari est un pilier. Il vient presque tous les jours nettoyer le magasin avec la machine. Il nous soutient moralement, et c’est précieux. C’est également le cas du mari de ma fille, et cela nous fait beaucoup de bien »
A 61 ans, Micheline se prépare doucement à passer le relais à sa fille, tout en restant impliquée. « Je vais avoir l’âge de la pension dans trois ans, mais je ne compte pas arrêter complètement. Tant que ma santé me le permet, je veux continuer. Stéphanie me dit souvent : « Maman, tu en fais trop. Il faudra engager plusieurs personnes pour te remplacer ». Elle a raison. Il faut que j’apprenne à déléguer davantage. » dit-elle en souriant.
Et si la vision de son propre avenir semble claire, Micheline est également attentive aux évolutions du secteur. « Je refuse d’ouvrir tous les dimanches. Je pense que les employés, comme les patrons, ont besoin de moments de repos. Je ne pourrais pas rester chez moi en sachant que mes employées travaillent un dimanche. Pour moi, le commerce doit rester humain. »
Concernant la technologie, elle est là aussi prudente : « Les caisses automatiques, je comprends leur utilité, surtout avec la pénurie de personnel. Mais ce contact avec les clients, c’est ce qui nous différencie. Je ne veux pas perdre ça. »
Enfin, elle n’hésite pas à partager un conseil aux jeunes générations souhaitant se lancer dans le commerce : « Soyez présents. Un magasin, ça ne tourne pas tout seul. Il faut s’impliquer, être sur le terrain, connaître ses clients. C’est ça qui fait la différence et qui permet de durer. »
« Avec Stéphanie, nous avons toujours eu cette fibre commerçante »