Analyse
16/4/25

Étude : le dépliant numérique pas encore une alternative à part entière à la version papier

Plusieurs détaillants ont récemment cessé de distribuer des dépliants promotionnels en papier au profit d’une communication numérique ciblée. Une stratégie risquée : les ménages qui ne reçoivent pas de dépliants dépenseront moins, selon une étude.

Trois arguments

Lidl Belgique a récemment annoncé qu’elle arrêtait complètement l’envoi du dépliant papier hebdomadaire. Désormais, la communication avec les clients sera numérique, même si les clients peuvent toujours trouver le dépliant dans les magasins. Lidl n’est pas le premier ou le seul détaillant à prendre une telle décision : en France, par exemple, les chaînes de supermarchés E.Leclerc et Carrefour ont déjà cessé de quémander des prospectus, en Belgique, la chaîne bio Bio-Planet (du groupe Colruyt) l’a déjà fait et, tout récemment, la chaîne de bricolage néerlandaise Praxis a également annoncé la disparition du prospectus papier.

Les détaillants invoquent généralement trois arguments pour justifier leur décision. Le développement durable en est un : le dépliant consomme beaucoup de papier et d’encre ; en le supprimant, les entreprises réduisent donc leur empreinte écologique. Le coût est un autre facteur important : en particulier ces dernières années, les prix du papier, de l’encre et de l’affranchissement ont augmenté de façon exponentielle, et les détaillants surveillent leurs dépenses. En outre, les détaillants constatent que la communication ciblée est plus efficace : grâce aux canaux numériques, ils peuvent envoyer aux clients des offres appropriées en fonction de leur profil et de leur comportement d’achat.

Moins de déplacements pour les achats

Mais ce raisonnement tient-il la route ? Une étude universitaire récemment publiée a examiné les effets d’un projet pilote de Lidl dans la province néerlandaise d’Utrecht en 2023. Le discounter a alors cessé de distribuer des prospectus papier dans cette région très urbanisée et a proposé aux familles le prospectus numérique de l’application Lidl Plus en guise d’alternative – les prospectus papier sont restés disponibles dans les magasins. Le détaillant est revenu sur cette décision au bout de 12 mois.

Ce qui s’est passé ? En se basant sur les données du panel de consommateurs de GfK (aujourd’hui YouGov), les chercheurs ont constaté que les dépenses et le nombre d’articles achetés par course chez Lidl ont chuté chez les familles qui ne recevaient plus de prospectus. Ce phénomène s’explique en grande partie par la baisse du nombre de courses effectuées chez Lidl. Aucun détaillant en particulier – y compris Aldi – n’a pu bénéficier du changement : les familles ont reporté une partie de leurs dépenses sur des détaillants primaires qu’elles fréquentaient déjà auparavant.

Effet contre-productif

La promotion du dépliant numérique dans l’application Lidl Plus n’a pas pu compenser cet effet négatif : les ménages qui ont utilisé le dépliant numérique ont également acheté moins chez Lidl qu’auparavant. Il semble que le dépliant papier ait encore encouragé les consommateurs à faire des achats supplémentaires qu’ils n’auraient pas faits autrement. Selon les chercheurs, le retrait du dépliant imprimé pourrait donc se retourner contre eux : la promotion des alternatives numériques s’avère inefficace pour les ménages qui ne les utilisaient pas auparavant.

Une autre question est de savoir si les économies réalisées compensent les ventes perdues. Une simulation indique un effet négatif : continuer à distribuer des dépliants en papier serait donc rentable – même si, bien sûr, les détaillants attachent de l’importance à l’argument de la durabilité. L’étude ne s’est pas étendue sur les effets des offres numériques ciblées.

Source : Retiring the Store Flyer: Effects of Ceasing Print Store Flyers on Household Grocery Shopping Behavior – by Arjen van Lin (Tilburg University), Kristopher Keller (University of North Carolina), & Jonne Guyt (University of Amsterdam)

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